« Synonymes » : pose à tous les étages

La crise identitaire d’un jeune Israélien exilé à Paris… Avec son nouveau film, Nadav Lapid a obtenu l’ours d’or au dernier Festival de Berlin. Une consécration qui laisse perplexe.

Comparé à ses deux films antérieurs, ce troisième opus de Nadav Lapid est « synonyme » de régression. © SBS Films

Il débarque dans les beaux quartiers de Paris et semble en proie à une intense fébrilité. Installé dans un grand appartement désert, Yoav, qui vient de quitter son pays natal, Israël, pour des raisons obscures, rencontre bientôt un jeune couple de dandys qui habite dans le même immeuble et avec lequel il partagera conversations intellectuelles et distractions sensuelles. En leur compagnie ou en solitaire, le héros mystérieux et désargenté tentera de comprendre les us et coutumes de l’Hexagone, d’apprendre la langue de sa terre d’accueil (il se passionne pour la lecture du dictionnaire) et d’oublier son pays d’origine avec lequel il paraît fâché à mort. Multipliant les petits boulots – vigile pour des ambassades, mannequin pour des photographes pornos -, Yoav, le reste du temps, erre fiévreusement dans les rues de la capitale et tente de trouver un sens à son existence.

Avec ses deux premiers films, « Le Policier » et « L’Institutrice », Nadav Lapid s’est imposé comme l’un des plus prometteurs cinéastes israéliens. Avec son regard critique sur les réalités de son pays et son exigence formelle, le cinéaste a été couvert d’éloges par les critiques internationaux. A l’heure de la sortie en salles de son troisième long-métrage, « Synonymes », inexplicablement honoré par un ours d’or au dernier Festival de Berlin alors que figuraient en compétition des fictions bien plus convaincantes (en premier lieu « Grâce à Dieu », de François Ozon), les spectateurs qui ont apprécié les œuvres précédentes de Lapid risquent de déchanter.

Préciosité ostentatoire

Malgré un sujet passionnant – la crise d’identité d’un jeune homme tiraillé entre deux cultures – et un humour surréaliste qui donne lieu à quelques scènes stimulantes, le film, inspiré de la biographie personnelle du cinéaste, étire paresseusement son intrigue énigmatique pendant deux longues heures, use et abuse des références (le couple d’amis dandys semble tout droit sorti d’un film de Godard des années 1960) et aligne des séquences interminables où le maniérisme et la complaisance ne pointent malheureusement (presque) jamais aux abonnés absents.

Avec sa préciosité ostentatoire et son refus de toute logique narrative, « Synonymes » ressemble à un essai de fin d’études réalisé par un apprenti cinéaste, certes talentueux, mais empêtré dans ses ambitions indécises et ses poses maladroites. En comparaison avec les deux films antérieurs de Lapid, ce troisième opus est « synonyme » de régression.

Source : weekend.lesechos.fr

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3 Comments

  1. Le documentaire M, d’ Yolande Zauberman, est plus que très bien: important et inquiétant. Un choc de réalité. L’invention (au sens de “découverte”) d’un iceberg invisible. Il nous interroge tous.

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